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Justice et sainteté : Les lois sociales de la Torah comme fondement du Tikoun HaOlam

La Torah n’est pas seulement un recueil de lois spirituelles ou rituelles. Elle trace les lignes d’un projet de société fondé sur la justice, la compassion et la dignité humaine. Les lois sociales qu’elle propose ne sont pas de simples règles civiques : elles sont des actes de Tikoun – réparation du monde – dans leur forme la plus tangible. Dans cet article, nous verrons comment la Torah inscrit la justice dans le cœur de l’existence humaine.

Justice avant tout : un appel divin à l’équité

« Justice, justice tu poursuivras. » (Deutéronome 16:20)

La répétition du mot « justice » indique, selon Rachi, qu’il faut la poursuivre par tous les moyens justes. La Torah établit un cadre légal rigoureux pour empêcher les abus de pouvoir, protéger les faibles, et garantir l’équilibre social.

Exemple : « Tu ne favoriseras pas le pauvre dans son procès, et tu ne feras pas de passe-droit au riche. » (Lévitique 19:15)
Cette équité absolue est la base du Tikoun juridique.

Lois économiques et équilibres sociaux

Shemitah et Yovel : remettre les compteurs à zéro

Tous les sept ans (Shemitah) et tous les cinquante ans (Yovel), la terre se repose, les dettes sont annulées, et les esclaves hébreux retrouvent leur liberté (Lévitique 25).

Exemple : « Tu proclameras la liberté dans tout le pays pour tous ses habitants. » (Vayikra 25:10)
Cette mesure évite la concentration excessive de richesses – un Tikoun économique unique dans l’histoire des civilisations.

Les coins du champ : dignité pour les plus vulnérables

La Torah ordonne de ne pas moissonner entièrement ses champs et de laisser aux pauvres les coins (peah), les épis oubliés (lékèt), et les grappes tombées (oléleth) :

« Tu les laisseras au pauvre et à l’étranger. » (Lévitique 19:9-10)

Ce geste est plus qu’un acte de charité : c’est une redistribution naturelle, intégrée au travail agricole.

Exemple : C’est un Tikoun qui permet aux plus faibles d’avoir accès à la nourriture avec dignité, sans mendier.

Protection des travailleurs et respect du temps

Salaire journalier : l’éthique du travail immédiat

« Tu ne retarderas pas le salaire du travailleur… car il est pauvre et il attend son dû. » (Deutéronome 24:15)

Le respect du travailleur, y compris son droit à être payé sans délai, est vu comme une mitsva centrale. Retarder le salaire, c’est briser la confiance sociale – réparer cela, c’est du Tikoun.

Le Shabbat : égalité dans le repos

Le Shabbat n’est pas réservé à l’élite. La Torah exige que même l’esclave, l’étranger, et les animaux aient droit au repos :

« Le septième jour est un Shabbat… tu ne feras aucun travail, ni toi, ni ton serviteur, ni ton bétail, ni l’étranger dans tes portes. » (Exode 20:10)

Le Tikoun ici est double : respect de la dignité humaine, et reconnexion du monde au rythme divin.

Relations humaines : amour, vérité et responsabilité

 

Aime ton prochain – fondement du Tikoun

« Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » (Lévitique 19:18)

Rabbi Akiva appelait ce verset la règle d’or de la Torah. Il ne s’agit pas d’un sentiment passif, mais d’un engagement actif à défendre la dignité de l’autre.

Exemple : Offrir du travail, protéger la réputation, éviter l’humiliation en public – tout cela relève de ce verset.

Interdiction de l’humiliation et de l’exploitation

« Ne fais pas souffrir l’étranger. » (Exode 22:20)
« Tu n’opprimeras pas ton prochain. » (Lévitique 25:17)

Ces commandements visent à bâtir une société où la dignité est inviolable. Le Tikoun passe par une vigilance constante : ne jamais profaner l’image de D.ieu en l’homme.

« blesser une âme, c’est faire une fissure dans le monde. La réparer, c’est refermer cette brèche invisible ». *

Un modèle intemporel : l’éthique sociale comme témoin du divin

Rambam (Maïmonide), dans son Mishné Torah, enseigne que la finalité des mitsvot sociales est de créer une société juste et paisible. Il affirme que la charité, la justice, la modération dans la richesse sont des piliers du monde.

« Le monde se tient sur trois choses : la Torah, le service de D.ieu, et la bienfaisance. » (Pirké Avot 1:2)

C’est dans cette dynamique que le Tikoun HaOlam devient la mission collective du peuple juif. Pas seulement par la prière ou l’étude, mais par l’action sociale fidèle à la Torah.

Conclusion

Les lois sociales de la Torah ne sont pas des ajouts périphériques : elles sont le cœur battant du projet divin. Elles montrent que le Tikoun HaOlam ne se fait pas dans les nuées, mais dans les champs, les tribunaux, les marchés et les maisons. Il s’incarne dans la justice économique, la compassion active, et le respect intransigeant de la dignité humaine.

La Torah nous donne les outils pour être des bâtisseurs du monde de demain, à commencer par notre comportement aujourd’hui. Le Tikoun, c’est transformer l’ordinaire en sainteté. Et cela commence maintenant, avec nous.

 

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